sources : Wikipedia, www.bagoucozdz.fr, Ouest-Eclair, Archives de vendée
voir les infos techniques, les photos, l'historique, ... du Saint Philibert
14 Juin 1931 : jour du naufrage
Un trajet aller Nantes-Noirmoutier sans encombre
Le matin du dimanche 14 juin 1931, ce navire des "Messageries de l'Ouest", affrété par la société "Les Loisirs", qui regroupe des membres de l'Union des coopérateurs de Loire-Inférieure quitte le port de Nantes pour une excursion sur l'île de Noirmoutier. Plus de cinq cents personnes, essentiellement des ouvriers et employés de Nantes et du département et leur famille, mais aussi de nombreux touristes admis au dernier moment, ont été embarqués. 467 passagers sont contrôlés, mais les enfants qui accompagnent leurs parents ne sont pas comptés. C'est presque le double de la charge prévue qui est a bord, mais le temps s'annonce beau, et la navigation océanique dans la baie de Bourgneuf est considérée comme facile. Sept hommes d'équipage, encadrés par le capitaine Ollive qui est pourtant retraité, doivent veiller au bon déroulement des traversées. L'aller se passe normalement et le Saint-Philibert accoste a l'Herbaudiere, sur Noirmoutier.
Des conditions de mer qui se dégradent pour le retour
Lorsque le bateau doit appareiller pour le retour vers cinq heures du soir, les conditions météorologiques se sont dégradées dans le courant de l'apres-midi. Le Capitaine Ollive hésite a partir. Il n'a levé l'ancre que devant les sollicitations de nombreux excursionnistes qui voulaient etre rentrés absolument chez eux le soir pour reprendre leur travail le lendemain. Quarante-six excursionnistes choisissent de ne pas réembarquer, certains préferent rester la nuit sur l'île, certains reviennent sur le continent par l'autocar qui emprunte le passage du Gois. Le Saint-Philibert, qui embarque les autres, affronte une mer déchaînée.
L'initéraire du retour et le lieu du naufrage
source : Ouest-Eclair du 16 juin 1931
Le naufrage
La tempete, d'une force imprévisible, rend la navigation tres difficile. Le vapeur n'est pas conçu pour le gros temps, possede des canots en nombre réduit et n'est pas équipé de TSF. Les passagers qui ne disposent pas de gilets de sauvetage, groupés sur la partie haute du pont du navire ce qui amplifie son instabilité, se portent a tribord pour éviter les paquets de mer qui arrivent par bâbord, ce qui fait dangereusement gîter ce bateau a fond plat, adapté a la navigation dans un estuaire encombré de bancs de sable et de hauts fonds rocheux, mais peu stable sur une mer formée. Une vague, plus forte que les autres, le fait chavirer. Touché par la lame, il se retourne et sombre presque immédiatement au large de la pointe Saint-Gildas, pres de la bouée du Châtelier.
Des remorqueurs venus de Saint-Nazaire, le Pornic puis le Saint-Georges et le canot de sauvetage de l'Herbaudiere arrivent sur le lieu du naufrage et recherchent des survivants. Mais seuls huit hommes, sept Français et un Autrichien sont rescapés.
Pendant des mois, la mer rejettera des corps
Plus de deux cents corps s'échouent les jours suivants sur le rivage, suivis de nombreux autres pendant des mois. Certains corps ne sont jamais retrouvés.
source : Ouest-Eclair du 17 juin 1931
à Saint Nazaire, on attend des précisions sur la catastrophe
à Nantes
Débarquement des premières victimes à Nantes
le lendemain, un bateau de pêche ramene des victimes a Nantes
Les 54 victimes nantaises n'ayant pas bénéficié d'une sépulture de la part de leurs proches sont inhumées par la mairie de Nantes dans le cimetiere La Bouteillerie, puis sont transférées au cimetiere Saint-Jacques quelques années plus tard, lorsqu'un monument citant les noms des victimes disparues lors du naufrage y est érigé.
La Chapelle ardente au Château des Ducs de Bretagne a Nantes
Une émotion considérable dans toute la France (et au dela)
L'émotion est considérable. Le 18 juin 1931, une foule immense accompagne les premières victimes quand elles sont inhumées a Nantes en présence du maire Léopold Cassegrain, du ministre de la Marine marchande Louis de Chappedelaine et du ministre des Affaires étrangeres et député de la Loire-Inférieure Aristide Briand. Cet événement touche durement la basse-Loire industrielle et ouvriere, îlot d'implantation de la gauche laique au sein d'une France de l'ouest encore largement traditionnelle et chrétienne.
plus de 200.000 personnes aux obseques a Nantes
Nantes fait d'émouvantes funérailles a 50 naufragés. Vers le château, c'est la ruée. Des rues alentours, c'est une véritable marée humaine qui monte, lentement, dans un grave silence, comme si chacune des 200.000 personnes qui se pressent aux obseques avait a déplorer elle-meme la perte d'un etre cher. 200.000 personnes ? Sans doute meme ce chiffre est t-il au dessous de la vérité, car la Ville de Nantes n'a pas été seule a conduire jusqu'a leur derniere demeure les victimes de la catastrophe. De toutes les villes voisines, de Saint Nazaire, de Paimboeuf, de la Montagne, d'Indret, de Savenay, de Blain, d'Ancenis, de Châteaubriand, de tous les petits villages situés aux alentours de la grand ville, des gens étaient venus, et des les premieres heures de la matinée, ce fut a toutes les entrées de la ville un passage d'autocars et les trains déverserent dans les gares des milliers et des milliers de voyageurs.
Des actes ignobles
S'il est un acte des plus ignobles entre tous, c'est bien celui qui consiste a commettre un vol sur cadavre : montres, portefeuilles, bagues sont volés sur les dépouilles qui jonchent le littoral de Pornic a Saint Brevin. Pire encore, on signale que de dangereux repris de justice cherchent a faire des échanges de leurs papiers d'identité.
Plusieurs contingents de gardes mobiles et d'agents de la sureté ont été dépéchés sur les lieux. Douaniers et gendarmes surveillent activement la côte ou toutes les mesures sont prises pour la répression de tels actes.
Autre conséquence surprenante du naufrage sur la population locale
Une autre conséquence de la tragédie est la défiance d'une partie de la population envers les poissons et crustacés de la région soupçonnés par elle d'avoir été contaminés par les restes des naufragés, ce qui a des conséquences importantes, pendant meme plusieurs années, sur l'économie locale de la peche. La crainte d'épidémie a cause des cadavres amenés sur les plages affecte aussi a l'époque le tourisme.
Août 1931 - La remise à flots du Saint Philibert
Le Saint Philibert va pouvoir livrer ses secrets : il va être renfloué. Il sera alors visité par les magistrats de Nantes qui cherchent à savoir s'il disposait bien du lest réglementaire. Objectif : déterminer des responsabilités !
Après visite sanitaire et désinfection, de nouveaux cadavres sont découverts. L'épave sera mise sous scellés, puis remorquée jusqu'à la plage de Mindin. De puissantes pompes ont aspiré le sable des machines.
C'est la saison estivale et malgré l'important service d'ordre, de nombreux touristes viennent à bord de bateaux de pêche, rôder autour de l'épave.
Apres le drame, le temps de la polémique
La période, troublée sur le plan politique et social, est le terreau favorable a des polémiques et allégations malveillantes, qui éclatent des la fin des obseques, et qui d'abord locales trouvent une audience sur le plan national. Certains dans les milieux d'extreme-droite, conservateurs ou cléricaux, appuyés par une certaine presse, cherchent a discréditer les victimes, souvent socialistes ou syndicalistes. Des rumeurs parlent d'alcool, de désordres et de violences a bord. Certains ne manquerent pas de souligner, parlant alors de châtiment divin, que si les ouvriers et leurs familles avaient participé en bons catholiques aux processions de la Fete-Dieu, ce 14 juin, ils n'auraient pas péri. Un proces a lieu en 1933. Parodie de justice, les familles des victimes sont déboutées et les armateurs affranchis de toute responsabilité dans ce naufrage.
Encore plus d'infos...
Plus bas sur cette page, grâce aux articles de presse de l'époque qui ont couvert tres largement le drame, vous trouverez davantage de détails sur les circonstances et les conséquences du drame.
1936 - L'Hommage
Le 30 novembre 1936, le conseil municipal de Nantes rend hommage au victimes du naufrage en donnant le nom de < place du Saint-Philibert > a l'ancienne < place de la Paix >, située au croisement des rues Gaston-Veil et Bias, non loin du quai d'embarquement du navire4. A la suite de l'aménagement de ces voies, elle disparaitra en tant que telle puisqu'elle ne figure ni dans la base de données des voies de Nantes Métropole ni au cadastre, et aucune plaque ne la signale sur place.